Les clowns sont des gens formidables. Ils ont un avantage sur le commun des mortels : ils peuvent rire de tout. Annoncer qu’ils vont sauter sur Colombey-les-Deux-Églises pour saluer la mémoire du général de Gaulle, ou qu’ils ont obtenu une rencontre secrète avec Donald Trump dans les catacombes de la basilique Saint-Pierre de Rome, lors des funérailles du pape François, et finalement avouer que tout cela, c’était pour de rire, pour la blague.

La suite ? Il suffit d’une pirouette, d’un pied de nez à la classe politique et ses compagnons de cordée, les journalistes, pour emporter la mise médiatique. Et populiste. C’est le tour de brigand qu’a joué Cyril Hanouna au magazine Valeurs actuelles. Son opération « Je saute sur l’Élysée » a été en tout point un modèle du genre.

À LIRE AUSSI Cyril Hanouna, retour sur un vrai-faux canularDans un premier temps, l’animateur et son équipe ont créé la rumeur sur son éventuelle candidature en 2027 en distillant les infos d’un éventuel plan de bataille « secret » pour redresser le pays, à la mode Trump, avec la création d’un Guantanamo français pour truands de haut vol, l’instauration d’un salaire minimal de 2 300 euros, et d’autres mesures visant à réduire le nombre de députés, ces bons à rien qui passent leur temps à se chamailler dans l’hémicycle.

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Héraut de la galaxie Bolloré

On imaginait déjà l’insatiable et suractif patron de Touche pas à mon poste, parachuté dans le bureau de l’Élysée, signant à la chaîne, lui aussi, devant caméras, une foison de décrets pour sauver la France du désastre. Tout cela était-il totalement absurde ? Après tout, ses proches répétaient autour d’eux que Coluche, un temps candidat, en 1981, avant d’arrêter la « blague », était un peu le modèle de la vedette de C8, que le clown Beppe Grillo avait, un temps, fait le buzz politique en Italie et surtout que Volodymyr Zelensky, avant de devenir le héros de l’Ukraine héroïque, avait été lui-même un comique, un comédien adepte de la farce et du simulacre. Pourquoi le pitre du groupe Bolloré ne se sentirait-il pas pousser des ailes, lui aussi, pour entrer en politique et secouer le cocotier d’une France au bord de la crise de nerfs ? Certains, piégés comme Valeurs actuelles, ont cru à ce scénario funeste.

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Et puis, devant l’énormité des réactions, il a sifflé la fin de la récré. Après avoir obtenu la une de l’hebdomadaire, il est sorti de sa boîte de farces et attrapes et a révélé la nature de son coup monté. En l’occurrence une opération de marketing au bazooka pour préparer la promotion de ses futures émissions sur Europe 1 et dans sa nouvelle maison, W9. Le coup était-il presque parfait ?

Pas vraiment. Car Cyril Hanouna n’est plus vraiment un simple clown, un amuseur public. Ses prises de position quotidiennes dans son émission d’Europe 1, On marche sur la tête, n’ont plus grand-chose à voir avec l’humour, la franche rigolade. Elles en font un héraut officiel de la galaxie Bolloré, un genre de porte-parole d’une idéologie ultraconservatrice, qu’on y adhère ou non. En montant cette fake news sur lui-même, il participe à la perte de confiance en la parole publique de ses propres supporteurs. Il a, à sa manière, jeté une pièce dans la machinerie du complotisme. Pas franchement de quoi se taper sur le ventre.