Est-ce le signe d’une fin de partie inéluctable ? Comme si le très habile François Bayrou, malgré son indubitable malice pour échapper aux avanies de l’Assemblée nationale, ne savait plus comment sortir des sables mouvants dans lesquels il est enlisé jusqu’au cou, pour ne pas dire paralysé.

Sa proposition de référendum pour demander quels sacrifices les Français sont prêts à accepter pour sortir le pays de son endettement abyssal est une vertigineuse loufoquerie. Une incongruité constitutionnelle, bien sûr, puisque seul le locataire de l’Élysée a ce pouvoir.

Elle est surtout le signe que notre Premier ministre cherche désespérément une ruse pour contourner cet hémicycle maudit qui le renvoie chaque jour un peu plus à son éviction prochaine. Le très roué et très expérimenté patron du MoDem est conscient comme personne qu’il est dans le couloir de la mort, que la censure peut s’abattre à tout moment sur lui, selon les intérêts fluctuants des potentiels présidentiables de 2027, de gauche, de droite ou d’extrême droite.

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Bayrou gouverne à blanc

Tout Premier ministre, dans ce contexte de majorité introuvable, est un homme en sursis, dont la légitimité est aussi grande qu’une feuille de papier à cigarette. François Bayrou n’a d’autre choix que de jouer l’esquive, d’autre option que de faire semblant de gouverner à grands coups de propositions sans avenir.

De la démocratie participative à tous les étages. Sur la réforme des retraites, il y a ce conclave mort-né des partenaires sociaux, qu’il a initié, lequel végète et n’intéresse plus personne ; il lui a permis, un temps, de faire un pied de nez aux députés.

À LIRE AUSSI La proportionnelle, le bouclier anti-censure de BayrouAlors qu’il dirige un gouvernement en roue libre, dans lequel les ministres s’expriment dans le plus grand désordre, il en appelle régulièrement à l’opinion, à ce peuple plus raisonnable que ses représentants. Depuis son arrivée à Matignon, c’est la voie qu’il a choisie pour ne pas sombrer : le contournement de l’obstacle. Faire comme si la France, dans cette situation, était gouvernable, alors qu’elle ne l’est visiblement plus.

Après la période de tétanie des premiers mois post-dissolution, le pays est entré dans une phase de paralysie. François Bayrou gouverne à blanc, en quelque sorte. Comment sortir de cette pantomime ? En arrêtant cette politique de l’autruche. En revenant aux urnes au plus vite. Problème : il faut attendre le début de l’été pour qu’une nouvelle dissolution soit prononcée par le président de la République.

Le « désert des Tartares »

Il faut donc jouer la montre encore une bonne dizaine de semaines, jouer les utilités, accepter de mettre en pratique avec entrain et légèreté la célèbre maxime d’Henri Queuille, plusieurs fois président du Conseil sous la IV^e République : « L’immobilisme est en marche, rien ne pourra l’arrêter. »

C’est un peu la tactique, héroïque, du maire de Pau. Il doit faire du surplace avec une forme d’énergie guillerette qu’il espérait contagieuse mais qui se heurte à la triste réalité du syndrome de la chambre introuvable. En tentant ce projet « farfelu » de référendum, selon l’expression d’Olivier Faure, le patron du Parti socialiste, il squeeze non seulement les députés, mais aussi celui qui l’a nommé à Matignon, Emmanuel Macron.

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Le chef de l’État a monté, lui aussi, une opération de contournement de l’Assemblée en proposant une nouvelle convention citoyenne sur les temps scolaires, provoquant haussements d’épaules et soupirs de lassitude des syndicats de l’Éducation nationale.

La posture de l’exécutif de notre pays, c’est un peu le « désert des Tartares ». Il attend un événement salvateur mais n’aperçoit que des rideaux de fumée. Pourtant, il faudra bien sortir de cette léthargie funeste, revenir aux urnes, accepter la dure loi du suffrage universel. N’est-ce pas le plus efficace des référendums ?