Informations française: Le «profil bas» de la Cédéao sur le Mali, analyses et réactions politiques
Le sommet des chefs d’État de la Cédéao qui s’est achevé dimanche 10 décembre s’est largement focalisé sur le cas du Niger. Mais l’organisation régionale était également très attendue sur le Mali. Ni la reprise de la guerre dans le nord du pays, ni le reportage sine die de la présidentielle censée marquer la fin de la transition n’avait provoqué de réaction jusqu’ici. À l’occasion de ce sommet, la Cédéao semblait ne plus pouvoir éviter de se positionner. Dans son communiqué final, elle s’est pourtant contentée du service minimum.
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La Cédéao « déplorer les décisions prises unilatéralement » sur « la mise en œuvre du programme de transition qui avait été convenue. » Le Mali n’est pas nommément cité, la remarque vaut pour les autres pays en période de transition – plus précisément pour la Guinée et le Burkina ; le CNSP nigérien et la Cédéao n’ayant pas encore conclu d’accord, le pays n’est pas considéré comme considéré comme « en transition » -, mais c’est la seule référence au rapport de la présidentielle malienne, initialement prévu dans deux mois, en février prochain.
« Renouer le dialogue »
Il y a trois ans, la Cédéao avait durement négocié, à coups de sanctions et au risque d’éconer son image, la durée de la transition malienne. Les autorités de Bamako ont finalement rapporté en septembre dernier l’élection, sans fixer de nouvelle date. Mais les temps ont bien changé, d’autres putschs sont passés par là et la Cédéao, loin de durcir le ton, n’ambitionne plus aujourd’hui que de « renouer le dialogue », « pour la mise en œuvre inclusive du programme de transition ». Un programme impliquant donc l’élection censée mettre un terme à cette transition.
Décision concrète qui pourrait le permettre : la levée de l’interdiction de voyager à laquelle étaient soumis le président, le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères du Mali, et leurs homologues du Burkina et de la Guinée. Interdiction qui ne facilitait pas les échanges et qui avait braqué Bamako.
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Kidal
La Cédéao va même jusqu’à « féliciter » le Mali pour le « bon retour » de son référendum constitutionnel du mois de juin. Aucune référence aux multiples accusations de fraude, ni au fait que le vote n’avait pas pu se tenir dans certains partis du territoire, notamment dans la région de Kidal.
Sur la conquête de Kidal, justement, par l’armée malienne et ses supplétifs de Wagner, ou plus globalement sur la reprise de la guerre dans le nord du pays et la rupture de l’accord de paix de 2015 : la Cédéao, pourtant membre du comité de suivi de cet accord de paix, n’a tout simplement pas mentionné l’événement. Ni pour féliciter le Mali, comme le souhaitaient certains, ni pour dénoncer la rupture de l’accord de paix, comme l’attendaient d’autres, ni même tout simplement pour en prendre acte.
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AES
Stratégie de long terme ? Divisions internes ? Le « profil bas » de la Cédéao sur le Mali ne sera en tout état de cause pas de nature à inquiéter les autorités maliennes de transition. Ni leurs alliés de l’Alliance des États du Sahel (AES) : l’organisation créée il ya trois mois dans la capitale malienne par les nouvelles autorités de Bamako, Niamey et Ouagadougou n’est pas directement citée, mais sa concurrence est vue d’un mauvais œil par la Cédéao qui, dans son communiqué, « rejette toute forme d’alliance visant à diviser la région ».
Réactions politiques maliennes
« Personne ne peut nous obliger »
Hamman Touré est le président du MSAT (Mouvement social Assimi takokele,) une organisation qui s’est récemment créée pour que le Colonel Assimi Goita se présente à la future élection malienne et reste président à l’issue de la période de transition.
« Si la Cédéao doit venir, il n’y aura pas de sujet tabou parce que le peuple malien, à travers ses autorités de transition, va répondre très clairement. C’est à partir de là qu’on peut avancer. Mais on ne nous oblige jamais, c’est ce que nous refusons. Personne ne peut nous obliger à prendre une décision maintenant. Nous, nous ne sommes pas pressés parce que nous avons beaucoup de choses, beaucoup de sujets sur la table. Nous avons des questions à traiter d’abord. Nous obliger ? Jamais ça ne se passera parce que nous avons des priorités avant ces élections », assure-t-il.
Sur la reprise de la guerre, la rupture de l’accord de paix, la Cédéao n’a pas dit un mot. « Nous avons récupéré Kidal, mais nous n’avons jamais entendu la Cédéao nous dire ses félicitations. Dieu merci, nous avons notre Kidal maintenant. »
« Comme si la Cédéao avait capitulé »
Ismaël Sacko est le président du PSDA (Parti socialiste démocrate africain), membre de la plateforme d’opposition Appel du 20 février pour sauver le Mali.
« Nous attendons que la Cédéao réagisse et corse le ton, ou mette en place un médiateur au moment où la junte assimite a décidé de reporter les élections. Donc cette position mi-figue mi-raisin, quelque part c’est comme si la Cédéao avait capitulé, c’est comme si la propagande et les menaces de la junte avaient eu raison sur la Cédéao. La junte malienne aura le sentiment d’avoir triomphé de la Cédéao et de l’ensemble de la classe politique, et elle ira à son rythme », affirme-t-il.
La Cédéao n’a pas commenté la reprise de la guerre dans le nord et la rupture de l’accord de paix : « La Cédéao est en train de passer à côté de l’essentiel. La guerre de Kidal n’avait pas lieu d’être, Kidal n’avait pas quitté le giron malien. Par rapport aux assassinats massifs, nous attendons une forte condamnation de la Cédéao. On parle de Wagner. La Cédéao doit prendre toutes ses responsabilités par rapports aux massacres qui ont eu lieu au Mali », conclut-il.
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